Lundi 25 Mars - Saint Arnaud : km 14,385
Notre dernière journée de grimpette sur l’île du sud. On connait chaque matin le dénivelé qui nous attend pour la journée - environ 750 mètres - mais on ne sait jamais comment les montées vont se présenter, long faux plat ou col de la Faucille. Evelyne n’aime pas le col de la Faucille, et elle n’aime pas les longs faux plats. Et pourtant, elle a aimé nos 3 semaines d’étapes dans les montagnes de l’île du sud. Un grand mystère, dont l’explication est donnée par les bons rapports entre nos 3 plateaux et nos 8 pignons, merci Histoire Bike.
On est sorti du bush hier, quand la vallée s’est élargie et a débouché sur la petite ville de Murchison où quelques fermiers s’étaient établis il y a un peu plus d’un siècle pour y développer fermage et élevage. Une ville isolée à 100 kms de la côte Est et 150 kms de la côte Ouest, il fallait le faire. Des prospecteurs d’or sont aussi passés par là, sans succès. Plusieurs fois, la terre a tremblé, 1929 et 1968 ont laissé des traces, d’autres secousses ont été ressenties en 2010, 2013... une bonne raison pour reprendre la route vite vite vite. En poursuivant aujourd’hui, on voit la couleur de la végétation se transformer, passant du vert foncé du bush de l’Ouest au jaune brûlé des Prairies de l’Est. Avec toujours les hauts sommets à l’horizon, mêlés à la brume, et leurs teintes allant du bleu Spiridon à l’indigo Ganea.
Le bois semble être une activité importante. On voit de nombreux pans de montagne en cours de déboisement, d’autres en cours de reboisement. On est bousculé par des semi-remorques chargés de quelques tonnes de bois, il faut rester attentif car la route est bonne mais étroite, et quand ils sont lancés, rien ne les arrête.
Une étape dans un no man’s land, on espérait notre café de 11 heures à la jonction Kawatari, confluent de la Hope River qui vient du Nord et de la Buller River dont on poursuit la remontée. En l’absence de café, on organise notre squat, et on en profite pour faire sécher la tente encore toute humide de la rosée du matin.
Saint Arnaud se situe à 600 mètres d’altitude. L’arrivée sur la ville est un long faux plat de plus de 10 kms, ligne droite interminable, heureusement sans vent. Je crois apercevoir au loin un lac, une forme de triangle équilatéral couleur turquoise qui semble se détacher entre deux montagnes. Je suis fier de l’expliquer à Evelyne, mais plus on avance, plus ça semble absurde d’apercevoir des arbres en plein milieu du lac. Jusqu’au virage où la vérité se dévoile : mon lac n’est qu’un champ. Déception.
Camping au bord du lac Rotoiti, un lac noir dont on voit le fond, une eau limpide. La pluie menace, on espère simplement qu’il ne va pas se remplir cette nuit.