Mercredi 20 juin - Nipigon : km 1,955
L'étape du jour : un peu plus de 100 kms, un peu plus de 1000 mètres en dénivelé, en terrain inhabité. Une épreuve de montagne, on est déjà dans les Rocky Mountains ?
Les routes du côté Nord du lac Supérieur sont connues des cyclistes en Ontario pour leur difficulté, à la fois par le profil des routes et par les vents très changeants dans cette région. Avec température qui perd quelques degrés dès que la route redescend sur le lac, il faut gérer les couches.
On aborde bien sûr l'étape la peur au ventre, mais rassurés par les 2 sandwiches Subway dans nos sacoches. Une étape qui se déroule finalement bien, en l'absence de vents contraires. Elle est animée par 5 rencontres spéciales.
A 15 kms du départ, stationnée devant un motel, la voiture suiveuse d'un sportif qui traverse le Canada en mode challenging, Stéphane Reynolds. Il est 8 heures du matin, peut être dort il dans la voiture ? C'est certainement le genre à rouler 250kms par jour, on respecte son sommeil et on le laisse tranquille, on lira la suite sur son blog.
Puis c'est la rencontre avec le train marchandises, un long serpent de plus de 2kms de containers. Impressionnant, je revois mes jeux d’enfant, le train électrique.
Traversée d'un lieu dit 'Plat Pays', on est chanceux, la station service est aussi le magasin d’alimentation général du village. Derrière son comptoir, Jessy semble être le chef de tribu de ce village First Nation, une centaine de personnes. Il a vécu quelques années à Québec, il parle bien le Français, il a préféré revenir dans son village classe First Nation, au milieu des siens, il s´y sent bien, il est chez lui. Le village se situe dans une vallée très plane, entre deux montagnes, les indiens l'avaient appelé initialement Pawgwasheeng, ce qui signifie 'là où la rivière coule', mais les explorateurs français ont préféré attribuer un autre nom, sans doute une pensée prémonitoire pour Jacques Brel.
La 4ème rencontre est l'histoire d'un rendez vous raté. Sur une portion de route plate et roulante, je vois venir en sens inverse un cycliste voyageur, les sacoches bien pleines. Je traverse la route et l'attend. Arrivé à 20 mètres, il crie "where are you going ?" je réponds, en montrant l'ouest "this way", il tend alors la main devant lui et me répond sans s’arrêter "I'm going that way". Je vais vers 'this', il va vers 'that', c'est clair, ce n'est pas la même direction. End of the story. Un ours !
La 5ème rencontre se situe devant la station service à l’arrivée, je pars faire quelques courses pendant qu’Evelyne garde les vélos. A mon retour, je la vois me rouler des yeux suppliants, elle trépigne devant un gars au débit de parole incessant, un ancien camionneur interdit de camionner depuis un an, impossible de s’en défaire. A la recherche d’amitié - « Make friends before you need them » est sa rengaine - il nous raconte sa vie, mais trop c’est trop, on n’a pas envie d’être son ami, on lui souhaite bonne chance et on met les voiles. Conclusion d’Evelyne : « la prochaine fois, j’irai faire les courses ».
Sans oublier la gentillesse du circulateur de travaux qui nous offre un chewing-gum avant de nous libérer la route vers la dernière montée.
Ce soir, on dort assis sur l'extrémité de la corne du lac Supérieur, une position bien confortable 3 semaines après avoir quitté Montréal.