Vendredi 19 Avril - Miranda : km 15,598
On retrouve ce matin nos petits oiseaux au bec rouge, toujours installés en rangs serrés sur la plage. Ce sont des mangeurs d'huîtres, Thames est sur la route de leur migration, ils se régalent. Les plus malins s'installent sur les quilles de support de l'ancien ponton, on assiste à une partie de chaise musicale.
Le ponton date de la belle époque de la ruée vers l'or, quand les bateaux venaient chercher le métal précieux pour aller le livrer à travers le monde. Thames s'est construit au pied des collines aurifères, à l'époque des premières prospections qui commencèrent dès 1867. La tribu Maori en place concéda les droits d'extraction pour un prix exorbitant à l'époque. Rapidement, la population grimpa jusqu'à 18,000 personnes, une belle réussite qui a vu naître hôtels, saloons, banques.... et les premiers mariages mixtes, amour ou intérêt ? Une école à réputation internationale s'y établit pour enseigner les rudiments d'extraction de l'or, avec des disciplines touchant à la chimie, métallurgie, géologie, maths, hydraulique, techniques de construction, et même astronomie. La fièvre de l'or dure quelques années, avec succès, puis le filon s'épuise, il reste quand même à Thames une population de 5,000 habitants, y compris les touristes qui entrent ou sortent de la péninsule de Coromandel.
C'est Vendredi Saint, respecté en NZ, tout est fermé. On a pris nos précautions hier, on transporte dans nos sacoches 2 jours de nourriture - céréales, café, pain, pâtes, beans, thon, fromage. On a oublié le chocolat. On suit un trail plus ou moins gravilloneux jusqu'à Waitakaruru, mi-parcours à une petite moyenne de 14 km/h. Arrêts nombreux près des oiseaux, mémorial aux mineurs, pont sacré des tribus Maoris au dessus de la rivière Wailhou. Un peu plus loin ce sont les vaches en procession en file indienne, on dirait un peuple en exil, la tête basse, elles ne nous prêtent aucune attention, absorbées dans leur tâche de se rendre au bout du chemin.
On a la chance de trouver un café ouvert, le 'Bugger', un terme de l'argot anglais utilisé pour exprimer quelque chose qui cloche. On apprend que c'est un terme amical, qu'on peut traduire, selon le contexte, par 'vieux con', ou 'oh merde alors' ou encore 'damned'. Sir Edmund Percival Hillary l'aurait utilisé en haut de l'Everest.
On quitte la piste pour remonter la baie Firth of Thanes plein Nord en direction d'Auckland, sur une toute petite route blanche, où on s'attend à ne voir personne. On s'est d'ailleurs renseigné hier pour savoir si la route est bien goudronnée. Erreur ! Tous les habitants d'Auckland partis pour un WE de 4 jours ont quitté l'autoroute saturé pour se reporter sur cette petite route. C'est terrible : absence de bas côté, étroit, des voitures qui se doublent.... Heureusement les camions ne sont pas sortis aujourd'hui, mais les motorhomes les remplacent. Un camping se présente au bout de 6 kms, on fonce, il est complet fully booked, mais en insistant un peu, on trouve toujours un lopin pour une petite tente et 2 vélos. À 100 kms d'Auckland, on est heureux.