Dimanche 28 Octobre - Mungyeong : km 8,575
Le temps change vite en Corée. Partis tôt sous grand ciel tout bleu par 5 degrés, on rencontre le vent à midi, la pluie à 13 heures et l’orage sévère à l’heure du thé. Entre temps, retour sur notre itinéraire initial, une belle ballade avec toutes les couleurs d’automne. Ça en valait la peine, un détour de 70 kms pour s'imprégner quelques heures de bonnes sensations, autant dans notre cage à oiseau que dans les ruelles de Hahoe.
On a eu le temps de faire la visite de Hahoe ce matin, bien avant l’arrivée des touristes, impression géante. Le petit déjeuner nous avait été servi auparavant à l’intérieur de notre petite cage, un plateau déposé avec café, toasts fromage-kaki, pancake à la blette, croustillant aux herbes - le meilleur petit déjeuner reçu en Corée. Comme quoi... il faut se méfier des pièges à touristes, ils ont parfois du bon.
On apprend que ce village a été fondé il y a 600 ans par les deux frères Ryu, la preuve l’arbre géant en plein milieu du village, qui a résisté à l’invasion japonaise, et vit encore avec son dieu Samsin caché dans le tronc, vénéré à chaque pleine lune par les habitants du village qui ont obtenu par leurs prières la certification de l’UNESCO. Le cadet des frères Ryu était premier ministre, l’aîné enseignait le confucianisme. C’étaient des gens biens, un peu aristocrates, pas mal altruistes, doux avec leurs serviteurs, généreux avec les paysans qui payaient le fermage en dessous du prix et étaient secourus lorsqu’une calamité agricole venait les frapper. Leurs enfants ont prospéré et construit à leur tour dans le village, de belles maisons entourées de maisonnettes à toit de chaume, c’est dans une de ces minuscules maisonnettes de 4 m2 qu’on a dormi sans se réveiller de 21 heures à 7h ce matin.
On croise dans sa propriété le dernier descendant de la famille Ryu, il occupe la grande maison de son ancêtre, la Bukchondaek House, il doit en avoir raz le bol de voir des centaines de touristes faire les cent pas chaque jour devant chez lui, c’est le prix à payer pour être devenu patrimoine culturel mondial.
Au moment de l’orage, on s’en sort plutôt bien : Evelyne a eu du nez pour nous trouver un abri de fortune 5 minutes avant qu’il éclate, éclairs et tonnerre dans la montagne tout autour, vent du Nord bien froid qui ramène la température à 8 degrés, pluie infernale... et nous, blottis dans le hangar d’une ferme sans activité ce dimanche.
Evelyne aimerait prolonger ce moment, elle rêve d’y passer la nuit, calfeutrés dans une couverture de survie avec la toile de tente sur la tête. J’essaie de la raisonner, on vient de se faire une nuit 21h - 7h, on aura du mal à en enchaîner une seconde, surtout s’il fait froid. Mais la pluie cesse, on quitte notre camp, pour trouver 4 kms plus loin un ´motel-pension’ avec une bicyclette dessinée sur l’enseigne. Peut être le dieu Samsin nous l’a posé sur la route. Aucun choix pour le repas qui nous semble être végétarien, mais il y a tellement de petites choses qui flottent dans la soupe qu’il pourrait très bien s’y être glissé un brin de viande. Un festival légumes - épices auquel il manque l’esquimau Gervais pour calmer l’incendie. Et maintenant... une seconde nuit de 21h à 7h ?